Par: Gwendal Le Colleter
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DATE LIMITE DE L’ENGAGEMENT DE CAUTION ET DROIT DE POURSUITE
Par une décision du 1er juin 2023, la Cour de Cassation a illustré la distinction entre obligation de règlement et obligation de couverture, donnant du fil à retordre à bien des étudiants en Droit (et pas seulement …).
Dans l’espèce considérée, une caution s’était engagée à garantir une dette principale, née et actuelle, correspondant à un prêt consenti à une société.
Son engagement avait été souscrit pour une durée limitée, correspondant à celle du prêt, augmentée de deux années.
La banque, ayant attendu l’issue de la liquidation judiciaire de la société cautionnée pour agir contre la caution (ce qu’elle n’était, il est vrai, pas obligée de faire), ne l’a finalement assignée qu’au-delà de la date limite de l’engagement.
Sans surprise, la caution a soutenu qu’elle ne pouvait plus être poursuivie après cette date, correspondant au terme de son obligation de règlement, et la banque a répliqué que cette date limite concernait uniquement l’obligation de couverture, ne permettant d’agir contre la caution que pour les dettes nées avant celle-ci.
Les juges d’appel ont décidé de suivre le raisonnement, non dénué de pertinence, de la caution, pour qui la date limite ayant été fixée deux ans après l’échéance contractuelle du prêt, elle ne pouvait concerner que la seule obligation de règlement, l’obligation de couverture étant nécessairement déjà éteinte, avec le terme du prêt cautionné.
Ce raisonnement n’a toutefois pas convaincu la Cour de Cassation, qui s’en est tenue au principe selon lequel « en l’absence de stipulation expresse contractuelle limitant dans le temps le droit de poursuite du créancier, le fait que la caution soit appelée à payer postérieurement à la date limite de son engagement est sans incidence sur l’obligation de la caution portant sur la créance née avant cette date ».
Or, pour la Cour de Cassation, la seule fixation d’une durée au cautionnement excédant le terme de l’obligation principale, ne peut être assimilée à une stipulation contractuelle expresse.
Depuis la réforme du cautionnement entrée en vigueur le 1er janvier 2022, la distinction entre obligations de règlement et de couverture a été consacrée dans les textes, l’article 2316 du Code civil disposant en effet, que « lorsqu’un cautionnement de dettes futures prend fin, la caution reste tenue des dettes nées antérieurement, sauf clause contraire ».
La décision commentée, prononcée sous l’empire du Droit antérieur, devrait néanmoins conserver son utilité, pour les cautionnements ne portant pas sur des dettes futures, seuls visés par le nouveau texte, mais sur des dettes déterminées, pour lesquels la solution devrait donc rester identique.
Cass. Com. 1er juin 2023 pourvoi 21-23.850, publié au Bulletin