Par: Gwendal Le Colleter
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Exceptions opposables par la caution : la chambre commerciale s’oppose à la première chambre civile ?
Par un arrêt du 20 avril 2022 (2022 pourvoi 20-22866) commenté dans un précédent article, la 1ère Chambre Civile avait décidé d’un revirement de jurisprudence quant aux exceptions opposables par la caution, dont l’engagement avait été souscrit avant le 1er janvier 2022.
Afin d’aligner la solution applicable, à celle issue de la réforme, pour les cautionnements souscrits à partir du 1erjanvier 2022, la première Chambre avait décidé de permettre aux cautions s’étant engagées avant cette date, d’opposer des exceptions précédemment considérées comme personnelles au débiteur (alors que seules les exceptions inhérentes à la dette pouvaient jusqu’alors l’être par la caution).
La 1ère chambre civile avait ainsi accepté, contrairement à sa position antérieure, qu’une caution puisse opposer, au créancier, la prescription biennale prévue par l’article L213-2 du Code de Commerce.
Par cet arrêt du 6 juillet 2022, c’est au tour de la Chambre Commerciale de statuer sur la question de l’opposabilité d’une exception, qu’elle avait précédemment jugée personnelle au débiteur, par une caution s’étant engagée avant le 1er janvier 2022.
Cette exception concernait, en l’occurrence, le préalable de conciliation, contractuellement prévu entre le débiteur et le créancier.
A la différence de la Première Chambre Civile, la Chambre Commerciale a, tout au moins sur ce point, décidé de maintenir sa position antérieure, refusant d’autoriser la caution à opposer cette exception au créancier, dès lors qu’elle était purement personnelle au débiteur :
« Aux termes de l’article 2313 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur. La fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en œuvre d’une clause contractuelle qui institue une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, ne concerne, lorsqu’une telle clause figure dans un contrat de prêt ou une convention de garantie de passif, que les modalités d’exercice de l’action du créancier contre le débiteur principal et non la dette de remboursement elle-même dont la caution est également tenue, de sorte qu’elle ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer »
Il restera toutefois à déterminer s’il s’agit là d’une position de principe, divergente de celle retenue par la première chambre civile et qui pourrait devoir conduire la Cour de Cassation à trancher la question en Chambre Mixte ou Assemblée plénière, ou si elle révèle une volonté de la Haute Juridiction de se positionner au cas par cas, en fonction de la nature de l’exception concernée (assouplissant ainsi sa position antérieure, sans l’abandonner).
Ce qui est en revanche certain, c’est que la caution qui s’est engagée depuis le 1er janvier 2022, pourra opposer au créancier cette exception, et lui imposer de recourir au préalable de conciliation, avant d’agir à son encontre…
Cass Com. 6 juillet 2022 pourvoi 20-20.085 publié au Bulletin